Aujourd’hui la tendance est à la création de son entreprise pour être indépendant et gagner de l’argent. Toutefois, certains oublient que la création de l’entreprise n’est pas une finalité ou un remède, ce n’est que le début d’un parcours éprouvant, semé d’embûches, sans gage de réussite au final, qui peut même être destructeur pour ceux qui n’avaient pas l’étoffe d’un entrepreneur mais qui ont fait comme tout le monde, parce que cela donne une image de gagnant de créer son entreprise.
Tout le monde (politiques, gouvernement, médias) pense avoir trouvé le bon filon avec l’entrepreneuriat, une véritable poule aux œufs d’or, le sujet qui fera du clic et de l’audience, des tweets et des partages, bref le buzz assuré. Or dire que la création d’entreprise, de startup est une solution au chômage qui frappe les jeunes congolais depuis des années est une véritable opération de communication, qui séduit les membres du gouvernement et les partenaires internationaux.
Bien que d’autres États en Afrique de l’Ouest, en Europe et en Amérique aient vu leurs chiffres baisser de façon spectaculaire, notre pays peine à trouver des solutions pour enrayer un chômage endémique. Pour y faire face, la tendance actuelle est d’inciter chaque jeune à prendre sa vie en mains et créer son propre emploi. En gros “Eux n’y arrivent pas, donc essayez, c’est votre tour, on verra si vous êtes meilleurs que nous”.
Au final l’État demande aux citoyens de trouver une solution là où les élites ont séché malgré leurs brillantes études, un réseau en or qui aurait pu leur offrir un poste de ministres à 6 chiffres annuels, et la confiance que le petit peuple a porté en eux.
Et oui jusqu’à présent, nous avons quand même tout attendu de l’État, des politiques, de leurs patrons, de leurs entreprises et ça c’est mal. Aujourd’hui, on doit se prendre en charge et ne plus rien attendre des pouvoirs publics. On doit créer sa vie, tracer son chemin, devenir qui on veut et se bouger. Ceux qui n’y arrivent pas, ben tant pis pour eux.
Avant on appelait cela la crise de la quarantaine, mais aujourd’hui elle arrive à 25 ans, parce que de toutes façons des jobs il n’y en a pas pour tout le monde, donc autant affirmer “je ne me sens pas à ma place dans le monde de l’entreprise, alors je suis en train de réinventer ma vie”, que se lamenter sur son sort et envoyer 150 CV pour rien.
Mais bon, une question se pose : si tout le monde crée son job et s’adresse aux mêmes clients qui eux-mêmes cherchent des clients, on fait comment pour gagner sa vie ? On tourne en rond, c’est ce qu’on appelle l’économie circulaire A force de s’adresser à la même cible, il va y avoir embouteillage sur le secteur.
Il suffit de regarder les intitulés des affiches sur les réseaux sociaux pour comprendre que tout le monde propose les mêmes services, « Community Management », « Marketing Digital », « Comment gagner sa vie sur internet » et même des services d’accompagnement aux entrepreneurs sous toutes ses formes ou de développement personnel de toutes sortes, mais toujours avec la même idée “devenez qui vous êtes”. Sachant que les nouveaux entrepreneurs, ceux qui en auraient besoin, n’ont pas d’argent, où trouver des clients ?? Sans compter que se déclarer coach d’entrepreneur alors qu’on n’a jamais été à son compte avant, c’est très limite.
N’oublions pas non plus les espaces de coworking. Évidemment il faut bien que tous ces entrepreneurs travaillent dans des environnements dédiés ou un écosystème dédié à l’entrepreneuriat. Sauf qu’il y a des chances pour que personne n’ai 30000/50000 FCFA par mois à donner dans un espace de coworking.
Alors on fait quoi ? On attend que tout le monde revienne à la réalité, on laisse cette mutation sociétale trouver ses marques, on espère que le chômage va baisser et que chacun pourra trouver un job qui lui plait, payé correctement et envisager de créer son avenir sereinement ? Chacun y trouvera son compte et selon ses convictions s’engouffrera là où il a envie.
Nous pensons que tous ceux qui ont vraiment envie de devenir leur propre employeur doivent tenter, mais pas parce que c’est une mode ou que ça fait bien, mais parce que c’est un choix de vie. On doit aussi s’engager sur ce chemin en sachant que la réussite n’est pas assurée et que même en travaillant 15h par jour, on n’aura pas forcément le succès attendu.
Il faut aussi savoir être patient, rester 3 années de plus chez ses parents, renoncer à avoir une maison et des enfants avant 35 ans, se sentir en décalage avec les autres, ceux qui ont eu la chance d’avoir un job salarié, se lever tous les matins en se demandant comment on va gagner sa vie, accepter des missions payées une misère pour pouvoir manger. Beaucoup. Mais peut-être pas autant qu’en entreprise où le job est inintéressant, la hiérarchie oppressante, les horaires contraignants, la sécurité financière ennuyeuse, la vie toute tracée ou presque, la retraite déjà préparée, etc…
Entreprendre c’est un état d’esprit, c’est au fond de nous, on le porte depuis toujours en soi, même si on n’avait pas mis de mots dessus. Déjà à l’école on refusait l’autorité des profs, même si on ne disait rien, on n’a jamais pu se résoudre à avoir des horaires, à se contenter de ce qu’on avait, à suivre les règles et à se couler dans un moule préfabriqué.
On peut avoir essayé, et certains l’ont fait pendant longtemps, mais un jour un accident de parcours – maladie…- vient réveiller en nous tout ce qu’on avait oublié et la vérité finit par s’imposer : il faut tout envoyer balader pour créer son entreprise au risque de regretter de ne pas l’avoir fait un jour où l’autre. Et tant pis si cela ne marche pas, on recommencera autre chose, ou on ira vivre au village. Mais tout le monde n’est pas fait pour cela quoiqu’en disent les intégristes de l’entrepreneuriat.
Alors créez votre boite ou votre emploi, lancez-vous, mais dites-vous que ce n’est que le début, qu’il y a une vraie vie derrière, pas toujours rose, que vous pouvez échouer et vous retrouver dans la galère, mais au final vous l’aurez fait ! Pour vous et seulement pour vous. Pas pour pour nos politiques qui ne pensent qu’à leur poche et poste.
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